Des terres à prix décents pour nos agriculteurs

Alors que le prix des terres agricoles atteint des sommes astronomiques en Brabant wallon, un nouveau projet agricole a vu le jour à Haut-Ittre : avec l’aide de ‘Terre en Vue’, 10 hectares sont à présent consacrés à des activités agricoles durables. Un appel aux coopérateurs est lancé par la coopérative pour finaliser l’achat du terrain.  

Aujourd’hui en Belgique, 43 fermes disparaissent chaque semaine. Les petites fermes, de moins de 50 ha, laissent la place aux grandes exploitations qui grandissent chaque fois plus. La disparition des petites fermes a un impact non négligeable sur la vie sociale de nos campagnes (le contact entre les agriculteurs et la population se perd) mais aussi sur l’environnement (les grandes exploitations pratiquent souvent une monoculture qui détériore la biodiversité). Au-delà de cela, chaque année en Wallonie, 2000 hectares de terres agricoles sont détournés de leur fonction nourricière : elles deviennent des pâtures pour les chevaux, des champs photovoltaïques, des plantations de sapins de Noël, des unités de biométhanisation, etc.

La pression immobilière qui s’applique sur les terres agricoles cause, dans certaines régions, un triplement du prix à l’hectare. A Ittre, le prix des terres est parmi les plus élevés de Wallonie, entre 60 et 80.000 EUR/ha. Malgré ce prix élevé, il y a toujours des acheteurs pour ces terres qui sont devenues l’objet d’investissements et de spéculations. La conséquence : les agriculteurs continuent à s’endetter pour acheter chaque fois plus de terre.

A côté de cela, le monde agricole est en pleine mutation. Aujourd’hui, 65% des agriculteurs ont plus de 55 ans. Alors que trop peu de jeunes prennent la relève, la majorité de nos agriculteurs seront donc prochainement à la retraite. Là aussi, les exploitations vont être revendues, engendrant plus de concentration.

La coopérative Terre en Vue est née de ce constat. Son objectif ? Racheter des terres agricoles pour les louer à un prix décent aux agriculteurs qui proposent des projets durables. 5 critères sont retenus pour la location des terres : être professionnel, pratiquer le circuit court, être respectueux de l’environnement, pratiquer une agriculture nourricière et être ouvert envers les citoyens. L’idée étant de créer des liens entre agriculteurs et populations locales.


Organisée sous forme de coopérative (soutenue par une ASBL subsidiée et une fondation), Terre en vue achète donc des terres agricoles pour les louer ensuite à des projets agricoles durables répondant à ces critères. En 2019, la coopérative a l’opportunité d’acheter 10 hectares de terres à Haut-Ittre, à la rue du Sacrement, à proximité de l’échangeur autoroutier. Grâce à un mécène (la fondation QiGreen), 7,5 ha sont achetés et dédiés à quatre projets agricoles : 3 ha de vignes (pour les vins naturels de Charlotte et Cyril), 4 ha de maraichage (des légumes de conservations (carottes, pommes de terre, etc.) pour Andy du Jardin des Saules et Renaud de Ferme trop tard), des courges et potirons pour Olivier de la Potironnerie et 3 ha pour Thierry et Kilian qui vont y planter un verger et y installer des poules pondeuses).

Antoine Gérard, de Terre en Vue, nous explique : « Les 2,5 ha restants ont été achetés par un investisseur privé, avec la promesse de les revendre à Terre en Vue au même prix dans les 5 ans. Aujourd’hui, Terre en Vue lance donc son opération d’achat et cherche des coopérateurs qui veulent se lancer dans le projet et rassembler les 178.500 EUR nécessaires. Chaque coopérateur peut donc acheter une (100 EUR) ou plusieurs parts pour l’achat des terres. Ils deviennent alors propriétaires de la terre et la louent à un prix décent à de jeunes agriculteurs. Notre idée est de créer un bien commun, qui appartienne à tous. Ces terres agricoles ne seront plus mises en vente et seront consacrées à une agriculture durable. »

En achetant ces terres au prix fort, Terre en vue ne rentre-t-il pas dans le jeu de la spéculation ?

« On aimerait mettre un terme à la spéculation du marché foncier ... tout en y étant aujourd’hui partie-prenante puisque nous achetons des terres. Toutefois, on essaie d’acheter un peu en-dessous des prix du marché, mais il y a de la concurrence et on est obligé de payer le prix du marché, mais on ne veut pas surenchérir. » justifie Antoine Gérard.

Les coopérateurs toucheront-ils des dividendes avec leurs parts ?

« Non, on ne donne pas de dividende, car notre but n’est pas de revendre des terres avec une plus-value. Il n’y a pas de retour financier pour les coopérateurs. Le but est de garantir d’avoir des terres nourricières » conclut-il.

Pour en savoir plus sur Terre en Vue : www.terre-en-vue.be (cliquez sur le projet Terres de la Bruyère pour Haut-Ittre) – Pour plus d’information, vous pouvez également contacter Antoine Gérard - antoine@terre-en-vue.be